Il était une fois Zoli. C’est une petite Rom de Slovaquie qui n’avait pas 6 ans quand les nazis ont noyé ses parents au fond d’un lac glacé. Heureusement, ce jour-là, Zoli se baladait au loin, avec son grand-père adoré.
Et de sillonner les routes, lui et moi. Je passais encore mes journées à regarder derrière, à attendre que ma famille nous rattrape, mais bien sûr cela n’arriverait plus. »
Ce grand-père débonnaire avait toutes les audaces. Y compris celle d’emmener Zoli sur des chemins ou d’ordinaire les Roms ne s’aventurent pas.
Comme nous cheminions vers l’est à l’ombre des montagnes, il a fini par promettre, si j’étais sage, de m’apprendre à lire et à écrire, moi aussi. Mais il ne fallait pas le dire, personne ne devait le savoir, c’était mieux comme ça, ceux qui se méfient des livres en feraient toute une histoire. »
Zoli apprend si bien la musique des mots, qu’elle en fait des chansons à texte, dont l’air s’élève puis s’épanouit au cœur des roulottes.
La poésie de Zoli ne cherchait pas à éblouir avec des pensés stupéfiantes, mais simplement à rendre inoubliable un moment singulier. »
Ces mélopées arrivent à l’oreille de Stransky, un poète communiste, qui lui prédit un destin extraordinaire. Il en sera d’ailleurs l’artisan, lui qui la fait connaître à la Tchécoslovaquie toute entière. Il est assisté dans cette noble tâche par Stephen Swann, dont Zoli envoûtera le cœur jusqu’à lui faire perdre la raison. La voulant à lui alors qu’elle n’est à personne, il commet l’irréparable trahison, qui attire à Zoli les foudres des siens.
L’assemblée la déclara faible, jugeant qu’il lui manquait la force du corps et de l’esprit, la condamnant Polluée à Vie pour Infamie et Trahison de la Cause Rom au profit d’étrangers. »
Pour avoir trop aimé les lettres, voilà Zoli jetée sur les routes, déchirée, abandonnée, affamée, brisée. Sa vie ne la quitte pas, mais dérape à l’ouest, en Autriche, en Italie, puis à Paris.
Voilà un roman équilibré et généreux. Colum McCann offre le beau destin de Zoli comme un cadeau qu'on n'attendait plus. Zoli existe, parce qu’elle n’est pas trop belle, rebelle, généreuse, talentueuse, courageuse, ni chanceuse. Elle est tout cela sans excès. Le monde où elle vit est juste, où la cruauté est là mais pas partout, où la bonté existe mais pas chez tout le monde.
Et la plume de Columm Mc Cann est si noble, qui s’efface devant ce destin.
On lui pardonnera de multiplier les détours vers la fin du roman, comme s’il s’était attaché à Zoli et se trouvait incapable de s’en séparer. Mais il finit par y arriver, il lâche Zoli et le lecteur en les poussant du pied sans brusquer, comme on le ferait d'une embarcation que l’on veut voir quitter la rive en douceur et s’en aller voguer dans la bonne direction.
Lisez aussi notre interview de Colum Mc Cann.
Zoli, Colum McCann, traduit de l'anglais par Jean-Luc Piningre, Belfond, 329 pages, 21 euros. Vous pouvez le commander sur Amazon.
Critiques, avis et analyses
J'ai découvert cet auteur avec "Danseur". On m'en a récemment beaucoup parlé en très bien. J'ai deux autres de ses titres dans ma PAL. J'ai bien l'intention de creuser. Donc, cestui-là est noté sur ma liste, of course.
Au début je n'étais pas très tentée par l'histoire, mais plus je lis d'articles sur ce livre, plus il m'intéresse !!
Tout est bon dans Colum, y a rien à jeter.
Premier livre: Song dogs (10/18), la rencontre d'un père et d'un fils en
irlande, magnifique, sans doute plus pour les hommes, mais si les filles veulent savoir comment nous fonctionnons avec nos pères ou fils...
Les saisons de la nuit: grand roman sur la construction des tunnels de New York et ceux qui aujourd'hui vivent dedans (les "mole people", le peuple des taupes...)
Outre Danseur, pur chef d'oeuvre qui emportera même ceux que la danse n'intéresse pas, ne pas rater le bijou que constitue le recueil de nouvelles intitulées Ailleurs en ce pays.
Cher Bernard en te lisant on croirait que tu connais personnellement Colum MCCann. Sans doute son écriture dit beaucoup aussi de ce qu'il est: Un généreux
Zoli est incontournable pour moi, "Les Saisons de la nuit" est un livre que j'ai adoré, "Danseur" est extraordinaire donc forcément... Mais même si je n'avais pas besoin de déclencheur cette fois, la lecture de ta note est un plaisir, je t'en remercie.
Depuis ce matin, je suis plongée dans un de ses recueils de nouvelles "Ailleurs dans ce pays". J'aime beaucoup. J'ai failli pas descendre à ma station de métro. ;-) Franchement, c'est vraiment très très bien écrit, juste. Pas un mot de trop qui gâcherait le tout.
Bon, tu m'excuseras, mais j'y retourne ;-)
Merci, Bernard, pour Zoli. Mon message sera bref, j'ai hâte d'aller me coucher pour le teminer...
Génial ! Je compte lire ce livre dès ce week end ! Je rencontre l'auteur mercredi... Beau billet !
Eh bien, je te dirai. Je crois que j'en ferai une critique dans Le Mag des livtres et non sur mon blog... je parlerai en tout cas sur La Lettrine de la soirée avec l'auteur.
Une amie m'avait offert "les saisons de la nuit"
ce fut un choc. Ecriture ensorcellante. Colum Mc Can vous emporte vers des univers d'un lyrisme superbe que je n'ai pas rencontrés chez d'autres écrivains contemporains.
Aujourdhui, par hasard, je viens de voir, son dernier livre en devanture: demain, c'est certain, je vais courir l'acheter.
Colum Mc Cann est pour moi un très grand écrivain.
D'abord, je conseille ce livre a tout le monde. Ce portrait de femme est magnifique, on se promène avec déléctation, fascination (mais aussi avec une certaine horreur pour tout ce qui a pu leur arriver) dans le monde des Roms. On se sent exclus, aussi, mais exclus car on ne se sent pas à la hauteur, d'une certaine manière...Lire aussi de Marc trillard: "De sabre et de feu": destruction d'un camp dans le midi de la france.
Bon, je vais jouer le rôle du poil à gratter de service, mais moi ce roman ne m'a pas entièrement convaincue... C'est un bon roman et un beau portrait de femme. C'est même plus que ça: un livre-hommage à un peuple et une culture méconnus et malmenés.
Toutefois j'ai trouvé regrettable que McCann ait ainsi sacrifié ses autres personnages au seul profit de Zoli. Et je trouve aussi que l'histoire se traîne en longueur sur la fin...
je viens d'acheter ce roman...je ne l'aurais pas fait sans vos critiques...(idem pour La physique des cattastrophes!)
je reviendrai plus tard pour vous faire part de mes émotions et de mon ressenti...
et bien voilà, je viens de terminer ce roman...et je partage l'avis de Blue Grey
C'est un roman agréable à lire : l'histoire est originale et intéressante, le style de l'auteur poétique et vivant...mais bon pour moi il n'a pas été une révélation...un peu de longueur...un portrait d'une femme peu ordinaire c'est sûr mais au final tellement libre qu'on ne la connaît pas, et on découvre son monde par les yeux d'un narrateur "obnubilé" par elle
j'ai presque envie de dire qu'il manque de l'épaisseur à ces personnages...
un peu dure peut être??
Bnjour, je suis en train de lire Zoli. Travaillant au contact d'enfants tsiganes, je regrette que la population de nos villes - en bordure desquelles les familles (du Voyage, comme on dit) s'installent - soit si méfiante et pleine de préjugés, encore aujourd'hui, quand ce n'est pas de la méchanceté. Cet été, des roms s'étaient installés sur un terrain d'une commune d'Ile de France et les enfants partaient chercher de l'eau dans un cimetière, seul point d'eau à 15 minutes à pied du terrain. Mal leur en a pris, un policier municipal les attendait sur le chemin du retour et à l'aide de son couteau a percé tous les bidons des enfants qui sont rentrés au camp en larmes et affolés.
olivier
olivier10@gmail.com
J'attendais avec impatience de lire "Zoli" : l'histoire m'a interessé, mais sans susciter mon enthousiasme. J'ai trouvé le style sec, et les rapports entre Zoli et le journaliste, peu clairs dans leur évolution, m'ont laissé sur ma faim. Par ailleurs les ellipses du récit, bienvenues dans les nouvelles, m'ont un peu déconcerté ici.
J'avais beaucoup aimé "Ailleurs en ce pays".J'essaierai donc d'autres titres.
ce roman est parfait en tout point.
L'histoire est passionante, aucune longueur.
Ce livre est parfait.
Je viens de lire ce livre et je ne suis pas si emballée que ça... Le style est un peu facile. Voire "bâteau". Mouais... Ca se lit, mais mollement...
J'ai lu Zoli après "1000 soleils splendides" et j'ai de la même manière été conquis par cette petite perle. J'adore me sentir transporté, découvrir, vibrer au fil ds pages, cela fut le cas pour Zoli... A lire sans réserves.
Une merveille, ce livre bouleversant du début à la fin, dans un anglais jubilatoire.
Pourquoi n'y a t il plus de nouveaux livres commentés ? depuis quelques temps, plus rien...
Je n'ai pu m'empêcher, cet été, de repenser longuement à ce livre...Je ne pense pas avoir besoin de préciser....
Non, et j'ai eu exactement la même pensée... Mais je crois que l'ayant lu, j'avais plus de clés pour comprendre.