Dans la nouvelle qui porte le titre de l'ouvrage, « La rêveuse d'Ostende », il est question du mystérieux destin d'Emma Van A., logeuse d'un bel immeuble de cette ville belge du bord de mer. Un écrivain parisien échoue en ces salons au charme suranné et soupçonne que la vie sentimentale d'Emma n'a pas été aussi déserte qu'une plage nordique en hiver, contrairement au persiflage de la gouvernante Gerda. Et si Emma avait été la maîtresse d'un roi ?

Quelques clichés, dans cette nouvelle.

Ses yeux demeuraient remarquables, grands, d'un bleu éclairci, un bleu où passaient les nuages du Nord. »

Mais aussi une admirable description du décor.

La mer du Nord avait des couleurs d'huître, du vert-brun des vagues au blanc nacré de l'écume ; ces teintes altérées aux nuances précieuses, alambiquées, me reposaient de mes éclatants souvenirs de Méditeranée, bleu pur et sable jaune, d'un chromatisme vif aussi primaire qu'un dessin d'enfant. »

Dans « Crime parfait », Eric-Emmannuel Schmitt s'essaye au genre policier. Gabrielle a tué son mari, irritée par ce secret qu'il refusait de lui livrer. Lorsqu'elle découvre enfin ce que son conjoint ne voulait lui avouer, elle prend conscience de l'énormité de son acte.

L'auteur conte ensuite l'histoire d'un patient paralysé et aveugle suite à un accident. A l'hôpital, il tombe amoureux de Stéphanie, son infirmière, qui, jusque là, aurait juré qu'elle n'était faite pour personne. Dans cette nouvelle, « La guérison », l'auteur ouvre tout grand le robinet d'eau de rose. Comme en témoignent ces mots.

Une fille de rêve, ce n'est pas celle que la fille rêve d'être, mais celle que le garçon voit. »

Dans « Les mauvaises lectures », il est question d'un intellectuel renfrogné qui s'était juré de ne jamais s'abaisser à lire un roman d'épouvante à gros tirage. Il aurait mieux valu, effectivement, qu'il s'abstienne...

Enfin, dans « Le bouquet », l'auteur nous propose de résoudre cette énigme.

A la gare de Zurich, sur le quai numéro trois, une femme attend tous les jours, un bouquet à la main, depuis 15 ans. »

Dans ce dernier recueil de nouvelles, j'ai retrouvé le plaisir essentiel d'une baguette artisanale qui se fend sous la dent. Un plaisir hélas un peu ordinaire. Ces cinq textes parfois racoleurs, sont exempts de conviction, d'ambition et, souvent, de style. Eric-Emmanuel Schmitt est un dramaturge hors pair, la construction intelligente de ces récits le prouve à nouveau. Mais il faut le dire, Monsieur le boulanger : mon impatience à retrouver un roman élevé et enlevé va... croissant.

La rêveuse d'Ostende



La rêveuse d'Ostende, Eric-Emmanuel Schmitt, Albin Michel, 311 pages, 22 euros.