Cette semaine, la question existentelle posée aux écrivains est : « Pourquoi écrivez-vous ? »
Je leur laisse la parole.
Douglas Kennedy, mai 2007
« Pour raconter des histoires ! Pour moi, la fonction d’un écrivain est double. Il doit d’abord écrire des histoires pour les lecteurs; mais il doit mettre dans ces histoires les tensions et les inquiétudes de la vie moderne. Je n’écris pas pour raconter la vie. Il y a 20 ans, quand je commençais à écrire, j’ai essayé quelques romans autobiographiques. C’était nul. J’ai découvert que si on veut recréer sa vie comme romancier, on écrit des romans ratés. » (dans Lire, dernier roman : « La femme du Vème »).
Marie Darrieussecq, juin 2007
« Mon métier, mon arme, mon rôle, c’est écrire. Pas plus pas moins. Je cherche à inventer de nouvelles formes, à écrire de nouvelles phrases, parce que c'est le seul moyen de rendre compte du monde moderne, dont le mouvement sinon nous dépasse sans cesse, demeurant illisible, incompréhensible. En ce sens toute écriture exploratrice, novatrice, est politique: même apparemment éloignée du "réel", des "événements", elle fournit le langage moderne, elle bâtit les outils verbaux et mentaux qui permettent de penser le monde. Elle fait rendre gorge au prêt-à-penser, au déjà dit. » (dans Livres Hebdo, dernier roman : « Tom est mort »).
Paul Auster, février 2007
« Parce que j’aime raconter des histoires. Je ne me considère pas d'abord comme un romancier mais comme un « raconteur d’histoires ». Mais, bien sûr, un raconteur d’histoires est quelqu'un qui utilise la fiction, les mots, et devient, par là même, ce qu’on appelle un romancier. Mais je cherche à raconter la meilleure histoire possible, pas à faire passer telle ou telle idée. Bien sûr, une histoire est plus agréable si elle est accompagnée de métaphores, si elle plonge aux racines de ce qui fait l’être humain. Mais l’histoire prime tout. Sinon, on ne fait plus de roman, mais de l’essai. » (dans Lire, dernier roman : « Dans le scriptorium »).
Orhan Pamuk, janvier 2007
« J'écris parce que j'en ai envie. J'écris parce que je ne peux pas faire comme les autres un travail normal. J'écris parce que je suis très fâché contre vous tous, contre tout le monde. J'écris parce qu'il me plaît de rester enfermé dans une chambre. J'écris parce que je ne peux supporter la réalité qu'en la modifiant. J'écris parce que j'aime l'odeur du papier. J'écris parce que je me plais à la célébrité. J'écris parce que la vie, le monde, tout est incroyablement beau et étonnant. J'écris parce que je n'arrive pas à être heureux, quoi que je fasse. J'écris pour être heureux. » (sur le site du prix Nobel, dernier roman : « Istanbul »).
Colum Mc Cann, septembre 2007
« Je crois en la nécessité de la parole écrite. Mais il faut distinguer la nécessité du pouvoir. Je ne suis pas convaincu du pouvoir de la littérature aujourd’hui, mais même si la littérature n’a pas de pouvoir, j’estime que la parole écrite est totalement nécessaire. Les histoires conservent la trace du temps. Elles mettent l’accent sur les questions du cœur humain. Faulkner dit que la meilleure écriture renvoie au cœur humain. C’est la trame de toute histoire. Et les meilleures ont le pouvoir de changer les choses. C’est quelque chose en quoi je dois croire… sinon, bien sûr, il est inutile d’écrire. » (sur l’Ivre de lecture, dernier roman: « Zoli »).
Je vous souhaite une excellente fête de Noël. La semaine prochaine, ce sera la "Revue de presse" ou "Paroles d'écrivains", selon l'actualité !
Critiques, avis et analyses
Merci pour ce 2ème Parole d'écrivains ! J'aime beaucoup ce que dit Orhan Pamuk.
Joyeux Noël !
De mon (humble) coté, j'écris pour les mêmes raisons que Douglas Kennedy et Paul Auster, pour raconter la vie comme je la vois... ou pas. C'est assez sympathique de s'accorder le pouvoir de triturer la réalité, d'en faire son jouet.
Et en voilà de la transition facile.
On dirait que Noël se pointe d'ici très peu, alors Joyeux Noël !
Décidemment, il me plait bien Colum McCann ;-))
Moi aussi j'écris parce que j'aime raconter des histoires :-) Ce qui me fait un point commun insoupçonné avec Paul Auster...
Bonne année