Nous sommes en 1984, avant la chute du mur. Thomas Nesbitt, 26 ans, est un écrivain américain en herbe. Il décide de partir s’imprégner de l’ambiance particulière de Berlin.

Berlin, un centre de gravité idéal pour un observateur prêt à explorer les secrets d’une métropole à la fois résolument moderne et confite dans un hideux passé, et côtoyant quotidiennement la morosité monochrome du système communiste. »

Pour arrondir ses fins de mois, il travaille à Radio Liberty, l’outil de propagande américaine à destination de l’Est. Et c’est là qu’il fait la connaissance de la mystérieuse Petra, allemande de l’Est expulsée à l’Ouest pour « comportement politique déviant » .

Sa beauté exprimait une profonde intelligence, une fragilité touchante mais aussi une détermination à maintenir la tête haute en dépit de l’adversité, ainsi qu’une extrême solitude. »

Petra et Thomas vivent une passion idyllique. L’écrivain apprend le destin déchiré de sa belle. Mariée à un poète accusé d’indiscipline envers le régime, elle a été torturée, irradiée et son enfant lui a été retiré.

Compte tenu de votre instabilité psychologique, il est impossible que notre Etat laisse un de ses enfants à la merci de quelqu’un comme vous. »

Elle invite Thomas à la fuir, elle et son destin maudit, mais le cœur vaillant tient bon. Ils parlent d’enfants et d’exil aux Etats-Unis.

Jusqu’à ce qu’un agent de la CIA prenne contact avec Thomas.

Je sais que Petra Dussmann travaille pour la Stasi, pour un agent nommé Helmut Haechen. Et nous avons des photos plutôt claires de ces deux-là au lit. »

Le sang de Thomas ne fait qu’un tour. En un instant, tout est terminé.

- Tu dois partir, me suis-je entendu murmurer.

- Thomas…

- Va-t’en, ai-je déclaré d’un ton encore étrangement calme.

- Je peux t’expliquer Thomas. »

Elle est embarquée par la CIA et il rentre aux Etats-Unis sur le champ.

Thomas a-t-il fait le bon choix, « cet instant-là ? » Il ne le saura qu’après la chute du mur, après avoir reçu, vingt-cinq ans plus tard, une longue lettre de Petra, et avoir poursuivi l’enquête.

Malgré la noirceur du thème, « Cet instant-là » est un roman généreux, bien construit et rythmé. L’auteur donne vie à des personnages espiègles, dotés de répartie et à la pensée positive. On retrouve aussi des ambiances berlinoises bien esquissées.

Des graffitis partout. Des petits cafés qui étaient comme la version germanique des anciens repaires beatniks du Greenwich Village de ma jeunesse, des bars qui reflétaient souvent le style heavy metal, avec de temps en temps une Bierstube traditionnelle ou des enclaves turques. »

Le livre à ses défauts, comme un style relâché, un côté bien-pensant, de solides clichés sur Berlin ou des passages à l’eau de rose.

Mais soyons de bon compte : on ne regrette pas d’avoir vécu avec Douglas Kennedy cet instant-là.

Du même auteur : la femme du Vème
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Douglas Kennedy, cet instant-là, traduit de l'américain par Bernard Cohen, Belfond, 493 pages, 22,50 euros. Vous pouvez le commander sur Amazon.