Patty est en couple avec Walter. D’apparence, c’est la femme idéale.

Il était difficile de résister à une femme que vos enfants adoraient, qui se souvenait non seulement de leurs anniversaires, mais également des vôtres et qui apparaissait à votre porte chargée d’un plat de cookies, d’une carte ou de quelques brins de muguet plongés dans un petit vase déniché dans un dépôt-vente, qu’elles vous disait de ne pas vous soucier de lui rendre. »

Mais derrière les apparences, vit une femme torturée. Qui trouve Walter adorable. Et c’est justement ça le problème.

C’est comme si j’étais suivie partout par un chien très gentil et très bien dressé. »

En fait, elle n’a jamais cessé de désirer Richard Katz, le meilleur ami de Walter, étoile montante et tourmentée du rock.

Et ce qui devait arriver arriva.

Dans son sommeil, à une heure encore sombre, elle se leva, traversa le couloir, entra dans la chambre de Richard et se glissa dans le lit à côté de lui. La pièce était froide et elle se colla contre lui. »

Mais au fil des ans, Walter se laisse quelque peu voguer, lui aussi. C’est que sa jeune assistante, Tabitha, se rapproche de lui…

Il y avait dix-huit mots dans le langage corporel avec lesquels les femmes signifiaient leur disponibilité et leur soumission, et Lalitha en utilisait alors une bonne douzaine en même temps à l’adresse de Walter. »

Et ce qui doit arriver arrivera, soyez en sûrs !

Le roman raconte aussi les tribulations de Joey, le fils de Walter et Patty, et son aventure avec Connie, la voisine du couple. Joey aime Connie, mais Jenna lui fait envie à un point que vous n’imaginez pas.

Et ce qui doit arriver…

Près de 1.000 pages pour de petites histoires (extra-)congugales ? Oui. Ce roman distille sur quatre décennies des existences ordinaires, où tout l’art est de vivre avec ses tourments, imperfections, trahisons et pétages de plombs sans alerter les voisins.

En passant, Jonathan Franzen décrit avec cruauté la classe moyenne américaine d’aujourd’hui, écartelée entre son confort si chéri, sa vague préoccupation pour l’environnement, son penchant pour la guerre et un imperceptible mais angoissant déclin.

L’auteur cliche à merveille certains travers de ce nouveau monde.

Comme quand il croque les bonnes mères de famille.

Galina était une de ces mères débordées, noyées dans la maternité, échevelées, les joues écarlates, les vêtements n’importe comment, la chair qui s’échappait d’un peu partout, mais elle aurait tout à fait pu être encore jolie si elle y avait consacré quelques minutes. »

Et balance balance quelques vérités universelles.

Il put se rendre compte que les décisions post-coïtales étaient beaucoup plus réalistes que les décisions pré-coïtales. »

Freedom est un roman plutôt réussi. Au rang des faiblesses, on notera d’épouvantables longueurs, et des personnages peu typés, présentant souvent des traits de caractère communs, comme ce cynisme de série, présent chez tous, ou presque.

Mais on s’amuse avec cet auteur si carnassier pour ses contemporains. On se rassure en se disant que cette société qui doute est américaine. Mais si le roman se passait à Paris je ne suis pas sûr qu’on aurait vu la différence…

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Freedom, Jonathan Franzen, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Anne Wicke, éditions de l'Olivier, 718 pages, 24 euros. Vous pouvez le commander sur Amazon.