Le Blog des Livres - Mot-clé - femmes<p>Le Blog des livres est un site littéraire qui propose depuis 2007 des critiques et des avis sur des livres et romans récents et des interviews d'écrivains.</p>2023-12-18T19:18:18+01:00Bernardurn:md5:22018af4414fc176da7671c3b1eda900DotclearLe coeur régulier - Olivier Adamurn:md5:1c2d3e5f60a1d08af5a39c1517d9ca742011-02-07T09:08:00+01:002018-10-17T18:27:13+02:00BernardLe lointainfemmesJaponsentimentalvoyage<p>Tiens, je n'avais jamais vu ça : un roman qui vous donne l'impression de prendre un bain bulles.</p>
<p>Vous vous y plongez et sentez progressivement monter une ambiance douce, un léger engourdissement, une agréable sensation...</p> <p>Sarah, la quarantaine, est la femme parfaite à tous égards. Mari parfait, enfants parfait, métier parfait. Mais la fissure est là, qui s'élargit.</p>
<blockquote><p>Je ne dors plus depuis si longtemps. Pourtant, chaque matin, à la question rituelle d'Alain, mon mari si parfait déjà coiffé douché rasé chemisé, « tu as bien dormi ma chérie », j'ai toujours répondu oui et souvent menti. »</p>
</blockquote>
<p>Sur un coup de tête, elle décide de partir dans un coin perdu du Japon pour prendre un peu de recul.</p>
<blockquote><p>Vu de près, pris dans le cours ordinaire, on ne voit rien de sa propre vie. Pour s'en saisir, il faut s'en extraire, effectuer un léger pas de côté. La plupart des gens ne le font jamais et ils n'ont pas tort. Personne n'a envie d'entrevoir l'avancée des glaces. »</p>
</blockquote>
<p>Sarah suit les traces de son frère Nathan, qui a mis fin à ses jours. Avant sa mort, il s'était installé dans ce petit village nippon, juché au pied d'une falaise. Il y avait rencontré un certain Natsumé, qui avait su apaiser temporairement les tourments de son âme.</p>
<p>Natsumé est un ancien policier, qui, doucement, pose la main sur l'épaule de nombreux candidats au suicide juste avant qu'ils ne sautent. Puis il les recueille dans sa petite maison chaleureuse.</p>
<blockquote><p>Il n'a aucun message à délivrer, ne croit en rien de particulier. Simplement, la vie est dure et certaines personnes, à certains moments de leur parcours, ont besoin qu'on s'occupe d'elles. Et nul n'a le temps pour ça. Lui si. »</p>
</blockquote>
<p>Lentement, au fil de l'eau, au fil des rencontres, puis au cours d’un séjour chez Natsumé, l'esprit de Sarah s'éclaircit. Elle prend conscience du rôle qu'elle joue dans ses propres tourments.</p>
<p>S'il existait un rayon « zen » dans les librairies, ce roman y figurerait. Tout y est lenteur et humidité, le style comme le décor.</p>
<blockquote><p>J'aimais par dessus tout le contact des pierres chaudes et lisses sous ma paume, mes jambes déformées par l'eau transparente, plus blanches que jamais dans la clarté lunaire. »</p>
</blockquote>
<p>Ce livre dit le mal-être d'une femme occidentale, désorientée par la dureté du monde du travail, la pesanteur des responsabilités familiales et la jeunesse qui s'éloigne. On lui reprochera d'être un peu trop formaté pour la femme de 40 ans qui s'interroge, rêve d'un grand voyage et d'un séjour en balnéo. L'auteur a voulu éviter le cliché, ça se voit, mais n'y parvient pas parfaitement.</p>
<p>On en sort comme après un bain bulle qui a duré un peu trop longtemps, engourdi, un peu irascible, mais apaisé quand même.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/blog/public/images/couvertures/Adam2.jpg" alt="Adam2.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Adam2.jpg, janv. 2011" />
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<br /> <em>Le cœur régulier, Olivier Adam, éditions de l'Olivier, 204 pages, 18 euros. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2757824430/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2757824430&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em>le commander</em></a><em> sur Amazon;</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2757824430" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2011/01/26/Le-coeur-r%C3%A9gulier-Olivier-Adam#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/279Mémoire vive - Vanessa Caffinurn:md5:0d079d4337da3d126f8ab50fc4df3c9a2011-01-31T22:06:00+01:002018-10-17T18:27:21+02:00MarieL'amourfamillefemmespeinture<p>Quel livre! Ca commence sur un mode mineur: situations et dialogues si banals que vous hésitez à poursuivre. Vous vous demandez comment les critiques ont pu encenser ce bouquin.</p>
<p>Puis tout à coup, vous vous sentez accrochés et plus rien alors ne pourra vous retenir de lire ce roman jusqu'au bout.</p> <p>Sara, jeune journaliste dans un grand quotidien, ne sait pas pleurer, pas plus que son père et son grand-père n'arrivaient à le faire. Elle n'a pas d'amis, de connaissances mais peut compter sur l'amour délicat de Clarence, qu'elle n'a d'ailleurs présenté à aucun membre de sa famille, ni d'ailleurs à personne.</p>
<blockquote><p>La vie à deux n'était pas son fort. Non qu'elle fût repoussante ou invivable, au contraire. Ses traits réguliers et harmonieux, sa crinière troublante et son regard doux déstabilisaient bien souvent les hommes qui croisaient son chemin. Le problème, c'est qu'elle n'avait jamais envie de s'attarder sur leur route. Et, à vrai dire, les intéressés n'insistaient jamais. »</p>
</blockquote>
<p>Sara, cependant, est très proche de sa grand-mère, Minouche avec qui elle a souvent de longues conversations. Un jour, celle-ci lui fait une incroyable confidence: pendant la guerre, alors que son mari était au front, elle a eu une liaison avec un peintre, héros de la résistance, et de cette passion est né un fils, le père de Sara.</p>
<p>Complètement déstabilisée, celle-ci ne sait que penser d'autant que Minouche souffre de la maladie d'Alzheimer. Pour connaître la vérité coûte que coûte la jeune femme décide de partir à la recherche de ce peintre. Elle le retrouve, il vit toujours dans le Bordelais, et cette rencontre va avoir pour elle et sa famille des conséquences inattendues...</p>
<p>C'est un roman incroyable, poignant qui vous happe d'abord sur un mode mineur puis petit à petit vous entraîne dans une spirale dont vous émergez atterrés, la dernière ligne achevant de vous assommer; quelques heures après l'avoir refermé, vous cherchez encore à comprendre et vous vous dites que l'auteur vous a terriblement bluffés.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/blog/public/images/couvertures/Caffin.gif" alt="Caffin.gif" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Caffin.gif, janv. 2011" />
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<br /> <em>Mémoire vive, Vanessa Caffin, Belfond, 216 pages, 17 euros.</em>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2011/01/18/M%C3%A9moire-vive-Vanessa-Caffin#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/277La couleur des sentiments - Kathryn Stocketturn:md5:4d911a087e5e7c31a098d9d4a258b7752011-01-20T18:43:00+01:002018-10-17T18:27:29+02:00ClaireLe lointainAmérique du NordEtats-Unisfamillefemmességrégation<p>Claire m'a vanté de ce roman avec tellement de passion, que je lui ai proposé de venir nous en parler ici. Je lui laisse la parole. Et merci, Claire pour cette découverte ! Reviens quand tu veux ! (Bernard)</p>
<p>Aibileen et Minny sont deux bonnes noires au service de familles blanches dans le Mississipi des années 60.</p> <p>Eugenia Skeeter est blanche, bourgeoise et obstinée. Elle veut écrire, elle écrira. Ce qui lui manque c’est un bon sujet. Une éditrice lui donne la recette miraculeuse...</p>
<blockquote><p>Vous dites dans votre lettre que "vous prenez un plaisir immense à écrire". Quand vous ne serez pas occupée à polycopier des papiers ou à préparer le café de votre patron, regardez autour de vous, enquêtez, et écrivez. Ne perdez pas votre temps à des évidences. Écrivez sur ce qui vous dérange, en particulier si cela ne dérange que vous. »</p>
</blockquote>
<p>Son histoire est là, sous ses yeux, dans sa propre maison. Ce sera celles de ces femmes noires traversant la vie des blanches et y laissant leur empreinte. Mais les Noires sont plus habituées à faire le ménage en silence qu’à raconter leur vie. Eugenia Skeeter devra les apprivoiser, les convaincre et abandonner ses propres peurs pour les rassurer.</p>
<p>Que dire ? Que j’ai aimé ? Non, je n’ai pas aimé. J’ai adoré, savouré. J’ai ri, je me suis révoltée, j’ai souri, j’ai eu honte.</p>
<p>Kathryn Stockett a osé le pari de se mettre dans la peau de ces femmes noires. Pari réussi. Ce roman n’a rien de complaisant, il est simple et juste. L’humour n’est jamais loin. Lorsque les bonnes parlent aux enfants dont elles s’occupent, c’est à nous aussi qu’elles s’adressent.</p>
<blockquote><p>Aibileen : Aujourd’hui, je vais te raconter l’histoire d’un extra-terrestre. (…) Un jour, un martien plein de sagesse descendit sur la Terre pour nous apprendre une ou deux choses.</p>
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Mae Mobley : Un martien ? Grand comment ?</p>
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Aibileen : Oh environ deux mètres !</p>
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Mae Mobley : Comment il s’appelait ?</p>
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Aibileen : Martien Luther King. (…) C’était un très gentil martien ce Luther King, exactement comme nous, avec un nez, une bouche et des cheveux sur la tête, mais les gens le regardaient parfois d’un drôle d’air, et je crois qu’il y en avait qui étaient carrément méchants avec lui.</p>
<p>
Mae Mobley : Pourquoi Aibi ? Pourquoi ils étaient méchants avec lui ?</p>
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Aibileen : Parce qu’il était vert. »</p>
</blockquote>
<p>L’écriture est vivante et rythmée par l’alternance de la narration des trois protagonistes. C’est un roman généreux qui n’a nul besoin de mélodrame pour nous toucher droit au cœur.</p>
<p>Ce roman n’est ni noir, ni blanc, il est plein de couleurs, celle des sentiments.</p>
<p>Il ne faudra sans doute pas longtemps avant qu’Hollywood ne s’empare de l’histoire. Pourvu qu’aucun film ne lui fasse perdre sa richesse.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/blog/public/images/couvertures/Stockett.jpg" alt="Stockett.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Stockett.jpg, janv. 2011" />
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<br /> <em>La couleur des sentiments, Kathryn Stockett, traduit de l’américain par Pierre Girard, éditions Jacqueline Chambon, 528 pages, 23,80 euros. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2330013078/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2330013078&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em> le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2330013078" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2011/01/20/La-couleur-des-sentiments-Kathryn-Stockett#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/278Purge - Sofi Oksanenurn:md5:5794b68e58ffbbf21f126647420bbdda2011-01-17T08:27:00+01:002018-10-17T18:27:43+02:00BernardL'amourenquêtefamillefemmesguerrehistoireRussiesuspense<p>Tu as lu Purge ? Euh non. Mais tu dois le lire ! Ah bon, pourquoi ? Mais t'as vu la tête de l'auteur ?</p>
<p>Or donc, on m'a recommandé près de 10 fois ce roman, sur base d'arguments hautement littéraires... Et je l'ai lu. Pas pour les piercings dans le nez de Sofi Oksanen, mais pour voir ce qu'il y avait à l'intérieur.</p> <p>J'ai découvert un petit vent frais, une belle histoire. Celle de Zara, une jeune femme qui atterrit un jour comme un ovni dans le jardin d'Aliide, dans une sombre bourgade estonienne.</p>
<blockquote><p>Un ballot gisait sous les bouleaux. Aliide s'approcha sans le quitter des yeux, en alerte. Le ballot était une fille. Boueuse, loqueteuse et malpropre mais une fille quand même. »</p>
</blockquote>
<p>Vieille, acariâtre, brisée par la vie, Aliide s'inquiète de cette visite inattendue. Elle a peur car elle a quelque chose à cacher, veut virer l'importune. Et Zara a peur car elle est en fuite. Elle sait qu'Aliide est de sa famille, sans plus. Elle est son seul refuge.</p>
<blockquote><p>Il fallait essayer d'être gentille, polie, bien élevée et serviable, mais elle avait une tronche de pute et des gestes de putes. »</p>
</blockquote>
<p>Au fil des pages, les deux menteuses se dévoilent l'une à l'autre. Pour avoir la paix, Aliide a jadis épousé le communisme : elle s'est mariée avec Martin, un cadre du parti. Hautement sexy.</p>
<blockquote><p>Martin avait toujours des restes d'oignons dans les dents. Il avait les muscles lourds, à ses bras pendaient de la peau molle. Les longs poils des aisselles étaient jaunâtres de sueur. »</p>
</blockquote>
<p>Mais Aliide n'aimait que Hans, un opposant allemand, qu'elle cachait au domicile conjugal, à l'insu de Martin.</p>
<p>Zara, elle, a suivi une amie à Berlin, et s'est retrouvée embrigadée dans un réseau de prostitution.</p>
<blockquote><p>Tout ce sperme, tous ces poils, tous ces poils dans la gorge et pourtant la tomate avait toujours un goût de tomate, le formage de fromage, même si dans la gorge elle avait toujours des poils. Ca voulait sans doute dire qu'elle était vivante. »</p>
</blockquote>
<p>Zara a fui le réseau, non sans avoir occis l'un de ses membres éminents.</p>
<p>Aliide vendra-t-elle Zara ? Zara découvrira-t-elle pourquoi, venant de Russie, elle a de la famille en Estonie ? Lisez Purge, vous le saurez.</p>
<p>Cela en vaut la peine. Le style est très cru, mais pas sans élégance.</p>
<blockquote><p>Lénine flottait majestueusement sur le tissu rouge, le regard vers l'avenir. »</p>
</blockquote>
<p>On vit le communisme au quotidien.</p>
<blockquote><p>Talvi avec sa copine avaient frotté un jeans Sangar avec une brique à n'en plus finir, pour qu'elles aient le même genre de pantalons qui avaient l'air usé qu'à l'Ouest. »</p>
</blockquote>
<p>Et on se passionne pour ces deux destins finement croisés, pour ces deux combats humains, féminins, presque féministes.</p>
<p>La construction est également originale. L'histoire n'est pas linéaire, mais distillée en flash-backs et retours à aujourd'hui. Cela donne du rythme, mais ce n'est pas parfaitement réussi : le dénouement arrive un peu trop tôt.</p>
<p>Un grand roman, Purge ? Mieux : un grand roman à succès. Et en plus l'auteur a une tête incroyable...</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/blog/public/images/couvertures/.Purge_m.jpg" alt="Purge.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Purge.jpg, janv. 2011" />
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<br /> <em>Purge, Sofi Oksanen, traduit du finnois par Sébastien Cagnoli, Stock, 401 pages, 21 euros. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2234062403/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2234062403&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em> le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2234062403" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2011/01/17/Purge-Sofi-Oksanen#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/276Chaque femme est un roman - Alexandre Jardinurn:md5:62f5a65fd64c26a4ada9113e4b6c9e752008-07-16T17:27:00+00:002018-10-18T10:13:53+00:00BernardL'amourfemmessentimental<p>Vous en connaissez sûrement. Des gens prétentieux que vous ne parvenez pas à détester. Connaissez-vous Alexandre Jardin ?</p> <p>Dans son dernier roman, à l'intitulé alléchant, il entreprend de nous dire son amour de ces dames.</p>
<p>Le roman égrène quelques petites histoires amusantes des femmes de la vie de l'auteur. Amoureuses, amies, maîtresses et, bien sûr, maman, toutes lui ont permis de grandir.</p>
<blockquote><p>Ce sont les femmes, en effet, qui m'ont appris à penser autrement, loin des glissières de sécurité. Les hommes, en revanche, ne sont pas mon genre. »</p>
</blockquote>
<p>Au fil de ces très courtes histoires, on croise ces phénomènes au féminin. Anne-Sophie-de-la-banque, par exemple, la guichetière qui épie l'auteur et sa famille depuis 1977, grâce à ses relevés de carte bancaire. Denise, aussi, qui envoie des bouquets anonymes aux dames de son quartier que Cupidon s'obstine à bouder. Hatsuyo, qui éconduit Alexandre Jardin sous la couette lorsqu'elle découvre qu'il n'est pas Daniel Pennac. L'auteur croise aussi Lola, qui lui laisse son portable...</p>
<blockquote><p>Et là, stupeur : cette Lola au physique tombé du ciel me laisse <em>effectivement</em> son téléphone portable de prix; au lieu de sa carte de visite. Mais à peine ai-je saisi sa manoeuvre qu'elle s'éclipse du café. Lola a disparu avec ses seins impossibles et j'ai toujours son téléphone à la main. »</p>
</blockquote>
<p>Puis il y a Heidi, la petite suissesse, dont le passe-temps consiste à occire des animaux à la carabine à silencieux, ou Leïla, qui s'invente des péchés innommables qu'elle confesse avec gourmandise dans les églises.</p>
<p>« Chaque femme est un roman » n'est pas... un roman. C'est une suite de petites histoires officiellement vécues, mais dont les personnages sont si trempés, les destins si épiques, qu'on peine à croire que la plume de l'auteur ne les a pas quelque peu fardées.</p>
<p>A la lecture, ce roman agace, car si l'objet est une ode à la femme, entre les lignes, l'auteur dit surtout son amour à Alexandre Jardin et ne se prive pas, du reste, de flatter la lectrice sans la discrétion qui sied à l'exercice. En refermant l'ouvrage, une impression de vacuité s'ajoute à ce désagrément. Puis bizarrement, quelques jours plus tard, ce recueil reste à l'esprit, avec ses gags, ses destins légers et fantaisistes et ses petites et grandes vérités, si bien dites. Comme celle-ci.</p>
<blockquote><p>Si les femmes aspirent volontiers à être aimées comme dans les livres, elles ne veulent en aucun cas que les sentiments soient du roman. »</p>
</blockquote>
<p>Ou encore cette sentence, que je vous livre pour terminer, une phrase si sage alors qu'elle enseigne tout le contraire.</p>
<blockquote><p>Au fond, la satiété tue ce qu'il y a de jeunesse en nous. Et si le bonheur aigu c'était ça ? Ne plus jamais dire non à sa curiosité aux aguets. Faire la guerre aux négations du siècle et sonner la charge contre les désagréments du réalisme. »</p>
</blockquote>
<p>Un bon divertissement, avec un (tout petit) zeste de profondeur.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Jardin.jpg" alt="Chaque femme est un roman" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Chaque femme est un roman, Alexandre Jardin, Grasset, 294 pages, 19,80 euros.</em>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2008/07/16/245-chaque-femme-est-un-roman-alexandre-jardin#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/225Mûriers sauvages - Imane Humaydane Younesurn:md5:f6c4d0fd5d00b23ac34eb7521ec508ac2007-12-01T16:35:00+00:002018-10-22T13:51:04+00:00BernardL'amourfamillefemmesmoyen-orientsentimentalvillage<p>Il y a des romans si doux, sensuels et savoureux qu’il se lisent lentement, comme on sirote quelques gorgées d’un thé des plus raffinés.</p> <p>« Muriers sauvages », de l’auteure libanaise Imane Humaydane Younes raconte l’histoire de Sara, qui grandit au cœur du petit village d’Ayn Tahoun. Sara n’a pas de maman et constate sans comprendre que les femmes du village ne l’appellent pas par son prénom.</p>
<blockquote><p>La fille de la maudite, voilà comment elles m’appellent. Un nom plus présent dans mon esprit que Sara. "La maudite", que mon père n’a pas cessé d’aimer et dont il garde précieusement une photographie sous son lit. »</p>
</blockquote>
<p>La vie suit doucement son cours dans la partie du village où réside Sara, avec son père, autoritaire, sa tante, aigrie, son demi frère rebelle, et sa voisine, la douce Moutia. Les jours s’écoulent au rythme du travail des chenilles qui font vivre la petite fabrique de soie.</p>
<p>Sara grandit, et, avec elle, l’envie de savoir pourquoi sa mère a disparu. Quand elle en parle à Moutia, celle-ci lui fait toujours la même réponse :</p>
<blockquote><p>Ta mère est partie à la recherche de son âme. On ne peut pas vivre sans son âme, l’air devient irrespirable. Si elle était restée ici, elles aurait fini par étouffer. »</p>
</blockquote>
<p>Sara tente de calmer ses interrogations dans l’amour. Elle vit un rêve avec Karim, à l‘endroit même au naît la soie.</p>
<blockquote><p>Il se trouvait face à moi quand, soudain, il m’a enlacée. J’ai laissé tomber une pleine brassée de feuilles en poussant un cri de surprise. Le bruit des chenilles me faisait penser au crépitement d’une averse automnale sur la terre sèche. Je me laissais entraîner à reculons vers le mur, tout en lui glissant que je sentais mon corps chanceler. Mon corps dispos jusque dans la dernière de ses fibres. »</p>
</blockquote>
<p>Je ne veux vous dévoiler si cet amour apaisera la soif de savoir de Sara, ou, au contraire, s’il lui permettra de résoudre sa question.</p>
<p>Je ne voudrais en effet vous gâcher le plaisir de déguster ce petit roman, très finement écrit, qui allie deux qualités que l’on voit rarement mariées : une écriture sensuelle, à l’instar des moments qu’elle décrit, et une très grande pertinence psychologique. Les événements paraissent parfois anodins, avant de se révéler comme autant de balises sur le chemin de la connaissance que suit inlassablement Sara. C'est aussi l'histoire de femmes qui violent intelligemment la toute puissance des hommes quand ils font entrave à leur bonheur.</p>
<p>Il y a aussi des petits moments de bonheur tout simple, sans enjeux, gratuits. Comme ici.</p>
<blockquote><p>Rien… Rien n’égale la sensation que me procure la coulée d’une goutte de rosée le long de ma nuque. Une goutte brillante sur une feuille d’amandier qui perle, roule et se détache. Elle tombe puis glisse lentement, dessinant sur ma peau une douce ligne sinueuse qui réchauffe mon corps transi. Rouvrant les yeux je vois luire au dessus de moi un soleil pâle. »</p>
</blockquote>
<p>Après une lecture difficile, après un moment pénible, où par temps glacial, qu’il est bon de s’emmitoufler dans cette belle histoire !</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Muriers.jpg" alt="Mûriers sauvages" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Mûriers sauvages, Imane Humaydane Younes, traduit de l'arabe (Liban) par Valérie Creusot, Verticales, 149 pages, 17,50 euros.</em>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/12/01/207-muriers-sauvages-imane-humaydane-younes#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/187Le nouvel amour - Philippe Forest - Rentrée littéraire 2007urn:md5:e2c464af692100e4b254ae87dbea11f82007-09-07T09:45:00+00:002018-10-22T14:35:11+00:00BernardL'amourfemmessentimental<p>Vous arrive-t-il de dévoiler quelques détails de votre intimité à des inconnus ? Beaucoup ne le font qu’au compte-goutte. Philippe Forest lui, ouvre carrément le robinet, et y accroche le tuyau d’arrosage. Je plains son entourage, élevé malgré lui au rang de héros de roman d’amour.</p> <p>Dans « Le nouvel amour », il raconte par le menu son histoire avec Lou, une femme qu’il a rencontrée au moment où il n’attendait plus rien.</p>
<blockquote><p>Mon existence ne différait de celles des autres que sur un seul point : elle était sans avenir. La reconduction à l’identique des jours, des semaines, des années, me laissait immobile au sein du grand mouvement du temps qui poussait tous les autres vers l’avant ».</p>
</blockquote>
<p>Il est marié avec Alice, la maman de sa petite fille envolée à jamais. Cette expérience de profond désespoir l’unit encore à elle, d’un lien qui ressemble à l’amour, mais qui ne l’empêche pas de fondre pour Lou.</p>
<blockquote><p>Un nouvel amour vient et, comme on a déjà vieilli, il y en a eu beaucoup d’autres avant lui. Et pourtant, il est le seul. Tout ce que l’on vous a donné avant lui, il vous le donne une fois de plus. »</p>
</blockquote>
<p>Au fil des pages, Philippe et Lou vont vivre une histoire accidentée dont le premier donne le ton. Il rend Lou heureuse ou malheureuse, en fonction de sa météo affective, qui, parfois lui fait promettre l’éternité à sa maîtresse, parfois lui fait entrevoir la rupture et son retour auprès d’Alice.</p>
<p>Le ton est cru.</p>
<blockquote><p>Même la masturbation ne parvenait plus à me reconduire vers la nuit. Je ne trouvais plus dans ma tête les images de Lou qui auraient suffi à me faire vider ensuite dans les draps. »</p>
</blockquote>
<p>Je n’ai pas envie de déconseiller roman, car la langue est belle et je sais que les histoires affectives des autres permettent parfois de se situer sur la carte de ses propres amours.</p>
<p>J’ai juste envie de dire que, personnellement, j’éprouve une aversion pour ce genre de littérature.</p>
<p>Cette histoire d’amour est d’une profonde banalité. L’auteur semble en être conscient, et se justifie parfois en disant que certains aspects des amours ne figurent dans aucun roman, comme s’il cherchait un prétexte pour se raconter.</p>
<p>Je me fous de savoir que Philippe Forest se fait jouir tout seul et qu’il fait l’amour toutes les trois pages à sa maîtresse. Le seul but de ce livre est que Monsieur se sente mieux et tant pis pour le lecteur.</p>
<p>Je n’ai rien contre l’écriture-thérapie. En revanche, le manque d’inspiration me désole. Et quand il s’étale avec autant de nonchalance et de manière assumée, je trouve ces écrits égoïstes. Je me trouve dur, là, mais rien à faire : j'ai vraiment l'impression que je pense ça :-)
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<img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Forest.jpg" alt="Le nouvel amour" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Philippe Forest, Le nouvel amour, Gallimard, 174 pages, 16 euros. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2070361233/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2070361233&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em>le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2070361233" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/09/07/160-le-nouvel-amour-philippe-forest-rentree-litteraire-2007#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/143Au secours pardon - Frédéric Beigbederurn:md5:d6052c900beb941f00f9e47729130ef62007-08-21T13:56:00+00:002018-10-22T14:35:54+00:00BernardL'amourfemmesRussiesentimental<p>Il y a plein de bons mots dans le dernier livre de Frédéric Beigbeder. Il y en a déjà un sur la couverture. Il est marqué « roman ».</p> <p>C’est un peu comme si les événements s’étaient produits comme ceci.</p>
<p>Il était un fois un écrivain de quatre bonnes dizaines d’années. Irrité par certains excès de son temps, il a hâte d’écrire son septième roman afin de coucher sur papier ce qui l’empêche de se coucher lui.</p>
<p>Il se sent mieux après avoir écrit ceci.</p>
<blockquote><p>Chez moi, on traite les enfants d’immigrés comme des délinquants à longueur d’année, jusqu’à ce qu’ils le deviennent, car les pauvres sont tellement obéissants qu’ils finissent par foutre le feu aux autobus et aux bagnoles, par courtoisie, pour ressembler à l’image qu’on leur projette d’eux-mêmes depuis la naissance. »</p>
</blockquote>
<p>Et ceci.</p>
<blockquote><p>En résumé, j’ai quarante ans : je ne sais pas qui je suis et je ne sais plus qui j’étais. L’angoisse du quadragénaire à l’approche de son anniversaire vient de l’addition de ces deux catastrophes. »</p>
</blockquote>
<p>Apaisé, mais arrivé à la page 153, il se rend compte qu'il n'a pas d'histoire. L’avorton de tragédie esquissé au début est donc complété. Il prend la forme d’un monologue d’Octave, qui s’adresse à un pope. Le prêtre orthodoxe l’écoute religieusement dans son église, en plein cœur de Moscou.</p>
<p>Octave exerce la profession de « talent scout ». Il est chargé par une grande firme de cosmétiques de trouver en Russie de nouveaux mannequins vedettes. Ou, pour reprendre ses mots :</p>
<blockquote><p>Mon but est simple : que trois milliards de femmes aient envie de ressembler à la même. »</p>
</blockquote>
<p>Sur des pages entières, Octave décrit le cynisme de sa profession, avec tellement de chaleur et d’humanité qu’il n’est absolument pas crédible.</p>
<p>Et ce qui devait arriver arriva : il tombe amoureux d’une de ses « cibles », Lena, qui voit en lui une puissante turbine d’ascension sociale. Et le roman se termine sur une glissade grotesque, qui trace au coin de vos lèvres un irrépressible rictus, éventuellement assorti d'un « mais quel con ! » généralement réservé aux feintes un peu lourdes lâchées par ceux qu'on aime bien quand même.</p>
<p>En fait, pour apprécier « Au secours pardon », il faut oublier que ce livre voulait devenir roman quand il était petit. Il faut le lire comme un édito géant sur une société que le dieu argent frustre et qui s’en cherche un autre. Les considérations sensibles et faussement immatures d’Octave séduisent, sur l’argent, l’oubli de l’autre, la lubricité des hommes, l’exigence des femmes et la rupture entre les premiers et les secondes. En le lisant de cette façon, on passe un bon moment, on se prend à réfléchir, alors qu’on n’était pas venu pour ça.</p>
<p>Et on se dit qu’en fait, Beigbeder n’est pas un romancier de talent. Car il faut pour cela deux éléments : être romancier et avoir du talent. Il lui manque le premier.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Beig.jpg" alt="Au secours pardon" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Au secours pardon, Frédéric Beigbeder, Grasset, 19,90 euros.</em>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/08/21/149-au-secours-pardon-frederic-beigbeder#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/131Elles - J.-B. Pontalisurn:md5:1bfd865ac0c205926b86a4766490dd162007-08-05T16:35:00+00:002018-10-22T14:36:18+00:00BernardL'amourfemmesnouvelles<p>Mon voyage au pays de la femme continue.</p> <p>En cette période estivale, c’est une destination de choix. Après avoir exploré leurs <a href="http://www.leblogdeslivres.com/?2007/07/21/137-mensonges-de-femmes-ludmila-oulitskaia">mensonges</a>, je suis parti à la recherche de leur âme, qui se révèle si bien dans l’amour. Mon guide est J.-B. Pontalis. Il connaît d’autant mieux la région qu’il est la fois écrivain, psychanalyste et amoureux.</p>
<p>Dans « Elles », son dernier ouvrage, il raconte une quarantaine de petites histoires d’amour sans aucune prétention. Ni dans l’intrigue, qui ne peut trouver son espace vital dans des textes aussi courts, ni dans l’écriture, propre, sans plus.</p>
<p>Pontalis raconte des courtes nuits d’amour, la déchéance d’un homme auquel les femmes, comme la chance, avaient toujours souri, il parle aussi de l’érotisme raffiné des tableaux de Bonnard ou encore de Bernard, qui aimait deux femmes à la fois. Il égrène aussi quelques-unes de ses amours de jeunesse, nous parle de sa mère, de la petite sœur qu’il n’a pas eue, et des idylles d’amis à lui, ou patients de son cabinet de psychanalyse.</p>
<p>Soyons honnêtes : ces histoires n’ont généralement aucun intérêt. On les oublie d’ailleurs presque aussi vite qu’on les a lues.</p>
<p>Mais alors, pourquoi ai-je aimé ce livre ? A cause des analyses psychologiques de Pontalis, livrées l’air de rien. C’est un peu comme ces chansons de variété dont on se surprend parfois à écouter les paroles, pour découvrir qu’elles éclairent une partie de nous-même, qu’elles livrent un message important, caché derrière une rengaine sans intérêt.</p>
<p>Il lâche, aussi quelques petites vérités universelles. Je vous en livre trois, vous les laisse méditer et poursuis mon voyage.</p>
<blockquote><p>Elle lui aura appris, pensera-t-il plus tard, que toute femme est insaisissable, alors même que les hommes se vantent de les prendre. »</p>
</blockquote>
<blockquote><p>Les signes du désamour sont plus visibles que ceux de l’amour. »</p>
</blockquote>
<blockquote><p>Ce qu’il y a de plus horrible, dans la vieillesse, c’est que les femmes ne s’intéressent plus à vous alors qu’elles vous intéressent encore. »</p>
</blockquote>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Pontalis.jpg" alt="Elles" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Elles, de J.-B. Pontalis, Gallimard, 197 pages, 15,5 euros.</em>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/08/05/140-elles-j-b-pontalis#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/113Mensonges de femmes - Ludmila Oulitskaïaurn:md5:a4f82b6e3e66d37b2dec8ef22361c0eb2007-07-21T14:37:00+00:002018-10-22T14:36:23+00:00BernardLa viefemmesnouvellesRussie<p>Les femmes sont des menteuses.</p> <p>Les hommes aussi. Mais leurs légendes et bobards sont d’une toute autre essence. Voilà le postulat de Ludmila Oulitskaïa (quel nom magnifique). Elle annonce ce scoop, sans prévenir, dès les premières lignes de « Mensonges de femmes », son huitième roman traduit en français.</p>
<blockquote><p>Peut-on comparer le bon gros mensonge masculin, stratégique, architecturé, aussi ancien que la réponse de Caïn, avec ces charmants petits mensonges de femmes dans lesquels on ne décèle aucune intention bonne ou mauvaise, ni même aucun espoir de profit ? »</p>
</blockquote>
<p>Troublant.</p>
<p>Et en plus, elle le prouve. En nous contant le destin de cinq menteuses.</p>
<p>Celui d’Irène, par exemple, qui fait croire à Génia, rencontrée pendant les vacances, qu’elle a épousé un grand compositeur dont elle a eu quatre enfants, qu’elle a perdus lors de trois accidents. De quoi bouleverser son interlocutrice.</p>
<blockquote><p>Comme ma vie est stupide ! On peut même dire que ce n’est pas une vie du tout… J’ai cessé d’en aimer un, je suis tombé amoureuse d’un autre… Vous parlez d’un drame. Pauvre Irène… Perdre quatre enfants… »</p>
</blockquote>
<p>Et puis il y l’histoire de l’humiliation d’Anna, dont l'amie, Macha, s'est fait passer auprès d'elle pour une grande poétesse. Un jour, Anna, si fière de son amie, récite l’un des poèmes de Macha dans une assemblée de jeunes intellectuels. Et il se passe ceci.</p>
<blockquote><p>Elle sentit que quelque chose clochait. Elle s’arrêta et leva les yeux. Quelqu’un riait sous cape. Un autre chuchotait avec son voisin d’un air perplexe. D’une façon générale, il y avait un véritable malaise, et la pause durait trop longtemps. »</p>
</blockquote>
<p>Pour une raison très simple : le poème n’était pas de Macha, mais du célèbre Maximilien Voliochine.</p>
<p>Les autres mensonges, tout aussi fins, sont distillés par des prostituées russes à Genève, par des enfants, et par une adolescente de 13 ans, qui s’invente une idylle avec un homme de trente ans son aîné.</p>
<p>Ce petit traité du mensonge ordinaire est délicieux. L’auteur espiègle. On aperçoit la Russie d’aujourd’hui, beaucoup plus raffinée que celle que les médias nous imposent.</p>
<p>On se régale aussi de quelques excès de langage et exagérations, qui nous rapprochent sans doute de cette insaisissable âme russe. Le tout servi sur une écriture aussi délicate que du caviar de la Caspienne.</p>
<p>On reçoit enfin quelques vérités sur les rapports entre les hommes et les femmes d’aujourd’hui. Comme ici.</p>
<blockquote><p>Un fer à repasser caresse quand on en a besoin, tandis qu’un homme caresse quand il en a besoin, lui ! »</p>
</blockquote>
<p>Il me reste une question existentielle après lecture de ce très beau livre. Et si c’était Ludmila Oulitskaïa, la menteuse ?
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<img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Mensonges.jpg" alt="Mensonges de femmes" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Mensonges de femmes, Ludmila Oulitskaïa, Gallimard, 188 pages, 16,5 euros.</em>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/07/21/137-mensonges-de-femmes-ludmila-oulitskaia#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/124Odette Toulemonde et autres histoires – Eric-Emmanuel Schmitturn:md5:64bc68963d233770fdbf022e947cda412007-02-13T20:14:00+00:002018-10-23T16:40:30+00:00BernardLa vieEric-Emmanuel Schmittfemmesnouvelles<p>C’est la première fois que me fais insulter parce que je lis un livre. J’ai eu le malheur de déposer « Odette Toulemonde et autres histoires » sur mon bureau. Un collègue a vociféré : « Tu lis ça ? C’est de la merde ».</p> <p>Cette remontrance tout en nuance m’a perturbé, car je l’avoue, puisque cela semble être un crime : j’aimais ce que j’étais en train de lire.</p>
<p>« Odette Toulemonde et autres histoires », c’est un recueil de nouvelles qui nous conte le destin de huit femmes. Celui de Wanda, par exemple, qui a fait fortune en choisissant les hommes qui pouvaient l’ensevelir d’or et retrouve par hasard son premier amour, sans le sou. Celui d’Aimée, aussi, dont le mari s’en va voguer sous d’autres latitudes amoureuses, non sans laisser un Picasso à celle qu’il abandonne. Un vrai, un faux ? Mystère.</p>
<p>Et puis il y a l’histoire de Nathalie, qui commence comme ceci :</p>
<blockquote><p>En vérité, rien ne serait arrivé si je n’avais pas changé de coiffeur »</p>
</blockquote>
<p>Ensuite vient le tour d’Odette Toulemonde, une nouvelle inspirée du film d'Eric Emmanuel Schmitt. Odette file ses jours dans la banlieue grise d’une triste ville de Belgique, et rêve de rencontrer Balthazar Balzan, l’homme qui écrit les livres qui la maintiennent en vie. Et devinez quoi ? Elle le rencontre ! Commence alors un festival de clichés, aussi énormes que les usines désaffectées de la cité d’Odette.</p>
<p>Dans le rôle de la petite Belge sans le sou mais heureuse quand même, car elle se contente de choses simples, Odette.</p>
<blockquote><p>Odette avait reçu un don : la joie. Au plus profond d’elle, il devait y avoir un jazz band jouant en boucle des airs entraînants et des mélodies trépidantes. Aucune difficulté ne la démontait. Face à un problème, elle cherchait la solution. Puisque l’humilité et la modestie constituaient son caractère, n’estimant pas, en toute occasion, qu’elle méritait mieux, elle ne se sentait guère frustrée. »</p>
</blockquote>
<p>Dans le rôle de l’écrivain parisien découvrant la simplicité des gentils pauvres, Balthazar Balzan.</p>
<p>C’est trop sucré.</p>
<p>En outre, Schmitt utilise un peu grossièrement son héros pour régler ses comptes.</p>
<blockquote><p>Effectivement, les critiques, tels des loups chassent en bande. La première critique avait déchaîné la meute. »</p>
</blockquote>
<p>Mais attention : si l’on excepte Odette Toulemonde, flatterie inexplicable du lecteur sensible, on tient une recueil pas si mauvais que cela. Disons que ces petites histoires vite écrites sont comme un spaghetti bolognaise cuisiné par un grand chef. C’est bon, mais ce ne sera jamais qu’un bolo…</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/odette.jpg" alt="Odette Toulemonde" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em><strong>Odette Toulemonde et autres histoires</strong>, Eric-Emmanuel Schmitt, littérature française, Albin Michel, 282 pages, 19 euros. Notre note : 2/5. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2253126624/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2253126624&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em>le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2253126624" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/02/13/58-odette-toulemonde-et-autres-histoires-eric-emmanuel-schmitt#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/51Ensemble c'est tout - Anna Gavaldaurn:md5:6fc1fc6faa7c9805dfbecfc96bf74cd52007-01-14T14:37:00+00:002023-01-08T08:55:44+00:00BernardLa vieAnna GavaldafemmesParis<p>Il y a des auteurs qui parviennent à mettre en scène des gens comme nous, sans rien, absolument rien de plus. Pas de grand drame, pas de grand destin, pas de grandes qualités, ni de grands défauts. Et on peut vraiment faire un bon roman avec ça ? Oui. Anna Gavalda y parvient, et sur plus de 500 pages.</p> <p>Elle nous conte simplement l’histoire de Camille, femme de ménage de son état, au caractère bien trempé, mais à la sensibilité au moins aussi forte. Elle n’est pas passée loin du point de non retour à la vie, la petite. Mais son chemin tortueux a croisé celui de Philibert. Qui n’a pas un Philibert dans ses connaissances ? Un type un peu vieille France, mal à l’aise à peu près partout, doté d’un humour qu’il manie malgré lui, d’une grande culture et d’une gentillesse abondamment prodiguée.</p>
<p>Il y a Frank, aussi, un mec, un vrai. Avec tout ce que cela comporte de machisme, de mauvaise foi, et de sensibilité savamment dissimulée. Il ne manque à ce tableau que Paulette, une personne âgée, légèrement manipulatrice, mais pas assez pour inspirer le rejet.</p>
<p>Cette fratrie nous amuse doucement au fil du récit d’Anna Gavalda. La prouesse, c’est qu’elle laisse vivre ses personnages. Pas d’intrigue hyper tendue pour vous conduire à la dernière page. Pas d’extraordinaire rebondissement pour relancer la machine. Non, rien que des vies. Ce qui, chez d’autres, aurait pu provoquer un profond ennui, donne chez Gavalda une impression de légèreté. On s’attache à ces personnages et on n’a plus envie de les quitter. On pardonne même à l’auteur quelques passages un peu nunuches, ou quelques répliques un peu fades ou attendues.</p>
<p>La langue aide aussi l’auteur a éviter l’ennui. Une langue vive, tintée de parisianismes, et une profusion de dialogues très crédibles.</p>
<p>Ce que j’aime aussi, c’est que c’est un roman complètement féminin. Tous les personnages, et surtout Frank, le vrai mec, sont décrits par la plume d'une femme. Croyez-moi, beaucoup d'hommes adorent. J’en ai encore surpris un, la semaine dernière, à l’aéroport, avec un léger sourire attendri qui en disait long !</p>
<p>Allez, un extrait, pour achever la démonstration.</p>
<blockquote>
<p>Le Pilon de la vie lui avait appris à se méfier des certitudes et des projets d’avenir, mais il y avait une chose dont Camille était sûre : un jour, dans très très longtemps, quand elle serait bien vieille, encore plus vieille que maintenant, avec des cheveux blancs, des milliers de rides et des taches brunes sur les mains, elle aurait sa maison à elle. Une vraie maison avec une cuisine en cuivre pour faire des confitures et des sablés dans une boîte en fer blanc cachée au fond du buffet. Une longue table de ferme, bien épaisse et des rideaux de cretonne. Elle souriait. Elle n’avait aucune idée de ce qu’était la cretonne, ni si cela lui plairait, mais elle aimait ces mots : rideaux de cretonne. »</p>
</blockquote>
<p><img alt="Ensemble, c'est tout" src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/ensemble.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" /><br />
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<em><strong>Ensemble, c'est tout</strong>, Anna Gavalda, littérature française, J'ai lu, 573 pages, 8 euros. Notre note : 4/5. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2290343714/ref=as_li_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2290343714&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21&linkId=36DTUZY7RLK6ADZD"><em>le commander</em></a> sur Amazon.<img alt="" border="0" height="1" src="https://ir-fr.amazon-adsystem.com/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2290343714" style="border:none !important; margin:0 !important;" width="1" /><br />
De la même autrice : <a href="http://www.leblogdeslivres.com/?2008/04/24/239-la-consolante-anna-gavalda">La consolante</a></p>
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<p> </p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/01/14/19-ensemble-c-est-tout-anna-gavalda#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/14