Le Blog des Livres - Mot-clé - Amérique du Nord<p>Le Blog des livres est un site littéraire qui propose depuis 2007 des critiques et des avis sur des livres et romans récents et des interviews d'écrivains.</p>2023-12-18T19:18:18+01:00Bernardurn:md5:22018af4414fc176da7671c3b1eda900DotclearLa couleur des sentiments - Kathryn Stocketturn:md5:4d911a087e5e7c31a098d9d4a258b7752011-01-20T18:43:00+01:002018-10-17T18:27:29+02:00ClaireLe lointainAmérique du NordEtats-Unisfamillefemmességrégation<p>Claire m'a vanté de ce roman avec tellement de passion, que je lui ai proposé de venir nous en parler ici. Je lui laisse la parole. Et merci, Claire pour cette découverte ! Reviens quand tu veux ! (Bernard)</p>
<p>Aibileen et Minny sont deux bonnes noires au service de familles blanches dans le Mississipi des années 60.</p> <p>Eugenia Skeeter est blanche, bourgeoise et obstinée. Elle veut écrire, elle écrira. Ce qui lui manque c’est un bon sujet. Une éditrice lui donne la recette miraculeuse...</p>
<blockquote><p>Vous dites dans votre lettre que "vous prenez un plaisir immense à écrire". Quand vous ne serez pas occupée à polycopier des papiers ou à préparer le café de votre patron, regardez autour de vous, enquêtez, et écrivez. Ne perdez pas votre temps à des évidences. Écrivez sur ce qui vous dérange, en particulier si cela ne dérange que vous. »</p>
</blockquote>
<p>Son histoire est là, sous ses yeux, dans sa propre maison. Ce sera celles de ces femmes noires traversant la vie des blanches et y laissant leur empreinte. Mais les Noires sont plus habituées à faire le ménage en silence qu’à raconter leur vie. Eugenia Skeeter devra les apprivoiser, les convaincre et abandonner ses propres peurs pour les rassurer.</p>
<p>Que dire ? Que j’ai aimé ? Non, je n’ai pas aimé. J’ai adoré, savouré. J’ai ri, je me suis révoltée, j’ai souri, j’ai eu honte.</p>
<p>Kathryn Stockett a osé le pari de se mettre dans la peau de ces femmes noires. Pari réussi. Ce roman n’a rien de complaisant, il est simple et juste. L’humour n’est jamais loin. Lorsque les bonnes parlent aux enfants dont elles s’occupent, c’est à nous aussi qu’elles s’adressent.</p>
<blockquote><p>Aibileen : Aujourd’hui, je vais te raconter l’histoire d’un extra-terrestre. (…) Un jour, un martien plein de sagesse descendit sur la Terre pour nous apprendre une ou deux choses.</p>
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Mae Mobley : Un martien ? Grand comment ?</p>
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Aibileen : Oh environ deux mètres !</p>
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Mae Mobley : Comment il s’appelait ?</p>
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Aibileen : Martien Luther King. (…) C’était un très gentil martien ce Luther King, exactement comme nous, avec un nez, une bouche et des cheveux sur la tête, mais les gens le regardaient parfois d’un drôle d’air, et je crois qu’il y en avait qui étaient carrément méchants avec lui.</p>
<p>
Mae Mobley : Pourquoi Aibi ? Pourquoi ils étaient méchants avec lui ?</p>
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Aibileen : Parce qu’il était vert. »</p>
</blockquote>
<p>L’écriture est vivante et rythmée par l’alternance de la narration des trois protagonistes. C’est un roman généreux qui n’a nul besoin de mélodrame pour nous toucher droit au cœur.</p>
<p>Ce roman n’est ni noir, ni blanc, il est plein de couleurs, celle des sentiments.</p>
<p>Il ne faudra sans doute pas longtemps avant qu’Hollywood ne s’empare de l’histoire. Pourvu qu’aucun film ne lui fasse perdre sa richesse.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/blog/public/images/couvertures/Stockett.jpg" alt="Stockett.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Stockett.jpg, janv. 2011" />
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<br /> <em>La couleur des sentiments, Kathryn Stockett, traduit de l’américain par Pierre Girard, éditions Jacqueline Chambon, 528 pages, 23,80 euros. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2330013078/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2330013078&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em> le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2330013078" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2011/01/20/La-couleur-des-sentiments-Kathryn-Stockett#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/278Ouragan - Laurent Gaudéurn:md5:76e32622b4dd021ff211a9f6c729eb212010-12-07T18:27:00+01:002018-10-17T18:27:51+02:00MarieLa vieAmérique du Nordcatastropheenvironnementmermort<p>Une écriture personnelle, des images fortes, un sujet original ? C'est bien lui, revoici Laurent Gaudé !</p>
<p>Nous avons tous vu ces images de tempêtes précipitant partout panneaux, branches, toitures dans des tourbillons diaboliques. Gaudé a choisi de raconter comment quelques personnages font face à l'ouragan qui a balayé la Louisiane, il y a 5 ans.</p> <blockquote><p>Tout craque dehors. Les femmes prient à voix basse sur la tête de leurs enfants. Ils se serrent, jambes entremêlées bras enlaçant les corps des plus petits, haleine dans les cheveux. Les ténèbres, à l'extérieur font un bruit de tambour. Que restera-il de la ville? Chacun se pose la question, mais nous essayons de ne pas penser plus loin que notre propre survie. Tenir jusqu'au moment où le vent faiblira, laisser les heures s'écouler et survivre à tout cela. »</p>
</blockquote>
<p>Il y a « la vieille négresse » comme elle se définit elle-même, qui s'octroie un peu le rôle du chœur antique en commentant les événements dont elle est témoin, en leur prêtant un sens et en intervenant dans l'action.</p>
<p>Il y a les résidents de la prison locale que dans leur fuite, les autorités se sont empressées d'oublier et qui voient avec épouvante l'eau monter dans leur cellule. Il y a le prêtre, aussi, mal dans sa peau et dans son sacerdoce : le sauvetage physique et psychologique de ses paroissiens pourrait, croit-il, le réconcilier avec sa vocation.</p>
<p>Et puis il y a cette jeune femme abandonnée par son amant et qui, avec une dignité incroyable, va tout faire pour se protéger, elle et son petit garçon. L'amant, quant à lui, pas très fier de son attitude tentera de braver les éléments pour revenir vers elle et lui venir en aide.</p>
<p>Voir des personnages banals se révéler soudain à eux-mêmes face à des événements imprévus et dramatiques est profondément émouvant : on a peur, on souffre, on se révolte (les victimes sont majoritairement noires) et on s'incline devant tant de dignité silencieuse et agissante.</p>
<blockquote><p>Elle regarde les rues de la ville qui se vident, les grappes de gens qui courent pour évacuer les maisons et elle sait qu'il n'y aura pas place pour elle. Elle regarde les pères de famille charger les voitures jusqu'à ras bord, prendre des réserves d'essence, elle regarde les mères qui ont des visages tendus et redemandent pour la cinquième fois aux enfants s'ils ont bien rempli leur gourde, elle regarde tout cela et elle sait qu'elle n'en fait pas partie. »</p>
</blockquote>
<p>Chacun, imprégné de son passé, va chercher dans ces péripéties dramatiques l'occasion de repartir à zéro. Certains en sortiront réconciliés avec eux-mêmes, d'autres y perdront définitivement leur âme.
L'empathie de Gaudé pour ses personnages nous touche profondément et se partage; ajoutez à cela un style onduleux presque incantatoire parfois, sobre et efficace et vous refermez le livre en pensant : quel beau roman !</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/blog/public/images/couvertures/Ouragan.jpg" alt="Ouragan.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Ouragan.jpg, déc. 2010" />
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<br /> <em>Ouragan, de Laurent Gaudé, Actes Sud, 192 pages, 19 euros. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2330010567/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2330010567&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em>le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2330010567" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2010/12/07/Ouragan-Laurent-Gaud%C3%A9#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/275Animaux fragiles - Tawni O'Dellurn:md5:a8851c4e4b51b85bc6a116de0baa656e2010-11-17T09:40:00+01:002018-10-17T18:27:59+02:00MarieL'amourAmérique du Nordfamillepsychologie<p>Quittons la France, ses prix littéraires, ses polémiques, pour nous repaître d'un roman attachant.</p>
<p>Car il est des livres que vous n'avez pas envie de lâcher parce que vous vous attachez tellement aux personnages que vous voulez prolonger le temps passé avec eux. « Animaux fragiles » est de ceux-là.</p> <p>Deux frères adolescents se font rouer de coups par la vie : leur mère suit un de ses amants en abandonnant les deux gaillards et leur père, elle embarque au passage leur petite sœur, qu'ils aiment profondément et quelques mois plus tard, leur père décède dans un accident de voiture.</p>
<p>Ils se retrouvent alors complètement paumés.</p>
<p>Mais refusent catégoriquement de retourner vivre chez celle qui les a lâchés sans le moindre état d'âme.</p>
<p>Le destin cependant les met en présence d'une vieille dame riche vivant pratiquement recluse dans un immense domaine, mais protégée par un majordome espagnol septuagénaire lui aussi. Elle vit avec le souvenir d'un seul et brûlant amour: celui qu'elle a éprouvé pour un mythique toréro, mort sous ses yeux dans une corrida.</p>
<p>Elle les recueille et commence alors pour ces personnages un lent et difficile apprivoisement, qui va aider la vieille dame à redonner un sens à sa vie, et va permettre aux deux garçons de se reconstruire.</p>
<p>Au début, elle est là simplement, distante et peu concernée et cela leur suffit mais en obligeant ces deux animaux fragiles à respecter certaines règles, elle balise leur existence de repères auxquels petit à petit ils vont s'accrocher pour enfin se sauver de la noyade.</p>
<blockquote><p>Lorsque j'ai accueilli Kyle et Klint chez moi, j'étais convaincue d'effectuer une véritable mission de sauvetage. Pas une fois, je m'en rends compte maintenant, je n'ai pris le temps de considérer ces deux jeunes comme des être à part entière. J'ai eu tendance à ne voir en eux qu'une expérience à mener, ou deux blocs d'argile à modeler. Je ne pense pas leur être antipathique... mais je dois reconnaître que j'ai échoué à leur inspirer de l'affection.</p>
</blockquote>
<p>La suite du roman démentira sa pessimiste impression mais la pudeur des sentiments est une caractéristique commune à tous les personnages.</p>
<p>Ce livre nous plonge dans une Amérique à la fois très proche de nous et tellement insolite : des réactions, des attitudes nous étonnent mais ces "bizarreries" d'Outre Atlantique contribuent à un certain dépaysement qui est un des attraits supplémentaire du livre.</p>
<p>Quelques réserves cependant concernant une fin très américaine, elle aussi, et une traduction (à moins que cela ne soit une écriture ?) parfois lourde et tarabiscotée.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/blog/public/images/couvertures/Tawni.jpg" alt="Tawni.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Tawni.jpg, déc. 2010" />
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<br /> <em>Animaux fragiles, Tawni O'Dell, traduit de l'américain par Bernard Cohen, Belfond, 21.5 euros. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2714443036/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2714443036&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em>le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2714443036" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2010/11/17/Animaux-fragiles-Tawni-O-Dell#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/274Lignes de faille - Nancy Hustonurn:md5:b9a9634b1539b1e53e92328a581e1f342007-01-22T09:38:00+00:002018-10-23T16:41:17+00:00BernardLa vieAmérique du Nordfamillemoyen-orient<p>Encore une idée géniale : écrire un roman raconté uniquement par quatre enfants de quatre générations différentes, et qui décrivent plus ou moins le même événement: l’enfance de Kristina, en 1944, et son destin à la fois tragique (je ne vous dit pas pourquoi) et extraordinaire (disons que ses malheurs ne l’ont pas empêché d’être heureuse).</p> <p>Mais s’ils parlent de la même chose, ces quatre enfants donnent en même temps plein de détails de leur vie, et nous apprennent comment vivaient les petits à quatre époques différentes.</p>
<p>C’est Sol qui ouvre le feu. Je sais, un enfant, c’est attendrissant, mais celui-là est insupportable. Il se croit plus intelligent que tout le monde, et il est bigot. D'accord, il n’est pas responsable de son arrogance. Il est surprotégé. La preuve :</p>
<blockquote><p>Les WC ont été sécurisés pour empêcher le couvercle de retomber sur mon pénis pendant que je fais pipi, ce qui doit faire très mal. Quand j’ai besoin de faire caca, il faut que j’appelle maman pour qu’elle vienne décrocher un crochet et baisser le couvercle avec beaucoup de précaution »</p>
</blockquote>
<p>Les autres petits conteurs sont plus sobres. Randall, qui est juif mais ne sait pas ce que cela veut dire, m'a touché. Son récit date de 1982, l'année où ses parents sont partis en Israël. Là-bas, il s'éprend de Nouzha, une enfant palestinienne, qui le rejette, suite à un mot de travers qu'il a prononcé. Il ne sait pas ce que juif veut dire, et pourtant il en souffre.</p>
<p>Ici, c'est Randall qui parle à Nouzha.</p>
<blockquote><p>- Ca me fait plaisir de trouver quelqu'un qui parle bien l'anglais, je lui dis. C'est dur l'hébreu, quand ce n'est pas ta langue maternelle.<br />
- Ce n'est pas la mienne non plus.<br />
- Ah bon !?<br />
- Eh ! non. Ma langue, c'est l'arabe.<br />
- Ah ! alors on est tous les deux des étrangers ! je dis, heureux de nous avoir enfin trouvé une ressemblance.<br />
- Pas du tout. Je parie que tu ne sais même pas dans quel pays tu te trouves. Le vrai nom de ce pays, c'est la Palestine.<br /> Moi je suis une Arabe de Palestine, c'est mon pays. Les étrangers, ici, ce sont les juifs.<br />
- Je croyais... que c'était...<br />
- Les juifs l'ont envahi. Tu es juif et tu ne connais même pas l'histiore de ton propre peuple.<br />
- Oh, je ne suis pas si juif que ça, je dis. Au fond je suis Américain, voilà.<br />
- De toute façon, l'Amérique est du côté des juifs.<br />
- Et bien moi, je ne suis du côté de personne, à part toi.»</p>
</blockquote>
<p>Chacun des petits narrateurs donne quelques indices du drame de Kristina, sans jamais le dévoiler. Cela fait un peu penser à un film de Tarantino, où les éléments de l’histoire sont disséminés et où il faut les reconstituer.</p>
<p>Mais le plus athlétique, dans la performance de Nancy Huston, c’est que l’histoire s’impose simplement, sans aucun effort du lecteur. L’auteur distille ses personnages et les événements avec énormément de doigté. Elle glisse discrètement des petits rappels pour éviter qu’on se perde. Si bien qu’en sortant du livre, vous avez tout compris, malgré le côté a priori désordonné du récit.</p>
<p>D'accord, le style n'est pas des plus choisis. Mais ce sont des enfants qui parlent, et on leur pardonne tout. sauf parfois quelques expressions d'adultes, mais bon.</p>
<p>Ajoutons pour conclure que l’histoire est d’une grande profondeur. Et que l’on sort grandi de ce livre : on sait désormais, si on l'ignorait, que notre personnalité dépend aussi d’éléments qui datent de plusieurs générations, et d’événements dont nous ne sommes absolument pas responsables.</p>
<p>A méditer !</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Lignes.jpg" alt="Lignes de faille" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Lignes de faille, Nancy Huston, littérature française, éditions Actes Sud, 481 pages, 21, 60 euros. Notre note : 4,5/5. Vous pouvez</em> <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2290036919/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1642&creative=19458&creativeASIN=2290036919&linkCode=as2&tag=leblogdeslivr-21"><em>le commander</em></a><em> sur Amazon.</em><img src="https://www.assoc-amazon.fr/e/ir?t=leblogdeslivr-21&l=as2&o=8&a=2290036919" width="1" height="1" border="0" alt="" style="border:none !important; margin:0 !important;" />
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/01/22/36-lignes-de-faille-nancy-houston#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/31American Darling - Russell Banksurn:md5:5c90380d634e434433e6fe02d25d0c822007-01-22T09:20:00+00:002018-10-23T16:41:23+00:00BernardL'aventureAfriqueAmérique du Nordcampagnelire<p>N’avez-vous jamais eu l’impression, en dévorant un roman, d’être en fait en train de lire une œuvre ? Je n’ai pas dit un classique. Mais un roman d’une telle densité, d’une telle intensité, avec des personnages tellement complets que le livre semble sortir de la catégorie roman pour chatouiller celle des œuvres.</p> <p>J’ai eu cette impression en lisant American Darling, de Russell Banks. Cette œuvre, donc, raconte l’histoire tortueuse d’Hannah Musgrave. Au moment où elle se livre à nous, cette Américaine a 59 ans. Elle vit retranchée dans sa ferme des montagnes Adirondacks, dans le Nord des Etats-Unis. Elle a acquis cette ferme pour se poser, enfin.</p>
<p>Car sa vie fut rock’n roll. Petite bourgeoise américaine, elle vit très mal cette identité. Alors elle s’acoquine avec les Weathermen, des révolutionnaires, opposant très actifs à la guerre du Viet-Nam. Sa spécialité : trouver des faux papiers à ceux qui se proposent de commettre l’un ou l’autre action visant à déstabiliser l’état américain.</p>
<p>Du coup, le FBI est à ses trousses. Elle part pour l’Afrique.</p>
<p>Elle se retrouve au Liberia, où elle épouse un notable local, Woodrow Sundiata. Hannah dirige désormais une clinique pour chimpanzés, des animaux qu’elle aime comme ses enfants, parce qu’elle leur a sauvé la vie. Quand elle a débarqué au Libéria, ils vivaient comme ceci :</p>
<blockquote><p>Mes yeux se sont un peu habitués à l’obscurité. Il y en avait qui étaient encore enfants, allongés dans un coin de leur cage. D’autres, qui disposaient de juste assez de place pour quelques pas furieux, toujours les mêmes, en avant et en arrière étaient manifestement adolescents. Une autre demi-douzaine d’adultes arrivés à maturité – des femelles, comme je le voyais à leur énormes organes sexuels – étaient obligés de rester courbés en deux quand ils voulaient se mettre debout, et leur volume corporel remplissait pratiquement toute la cage. Un peu plus loin, j’ai vu quatre ou cinq adultes encore plus corpulents, qui secouaient les barreaux avec une force terrible. Ces gros mâles ont craché dans ma direction et m’ont jeté des ordures et des morceaux d’excréments ; ils me lançaient des regards haineux et me montraient leur bouche caverneuse grande ouverte et presque édentée. »</p>
</blockquote>
<p>Russell Banks nous fait alors vivre avec une rigueur historique mais aussi romanesque les prémisses de la guerre civile dans ce petit pays. Et là, vous avez non seulement la sensation de vivre une histoire bien racontée, mais aussi de vous instruire. Un plaisir doublé !</p>
<p>Je ne vous conte pas la suite de l’histoire. Je ne puis en tout cas que vous recommander ce roman très dense, qui nous rappelle que les Américains savent ce que raconter des histoires signifie, et qu’on peut être né Outre-Atlantique et avoir une vision de l’Afrique qui n’est pas impérialiste.</p>
<p>Ah oui, j’oubliais : Russell Banks n’a jamais mis les pieds au Libéria. Dingue, non ?</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/American.jpg" alt="American Darling" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em><strong>American Darling</strong>, Russell Banks, littérature américaine, Actes Sud, 393 pages, 24 euros. Notre note : 4/5.</em>
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Du même auteur : <a href="http://www.leblogdeslivres.com/?2008/09/26/251-la-reserve-russell-banks">La Réserve</a>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/01/22/35-american-darling-russel-banks#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/29Une fille dans la ville - Flore Vasseururn:md5:0f105cd56ea426aad1c7286337ab741d2007-01-14T15:40:00+00:002018-10-23T16:42:34+00:00BernardLa vieAmérique du NordEntreprise<p>Peut-on vraiment parler d’un roman ? Je ne trouve pas. Il s’agit plutôt d’un très long témoignage, de ceux qu’on lit dans les magasines d’actualités. C’est une tranche de vie de Flore, une battante, rentrée à HEC sur un coup de tête : une démonstration de tai chi devant le jury final.</p> <p>Attirée par la bulle Internet, elle s’envole pour New York où elle crée sa start up, sa petite société de services informatiques. Cela ne se passe pas sans heurts.</p>
<blockquote><p>Dans son bureau, le banquier d’affaires s’extasie devant ma présentation montée sur Powerpoint, ne me laisse pas finir :</p>
<p>
- OK, ça suffit, j’ai compris, dit-il.
- Bon.
Il a l’air pressé.
- Combien voulez-vous ?
- 500.000 dollars ?
Il me regarde, dépité.
- Manque évident d’ambition. Vous m’auriez dit 5 millions de dollars, je vous les donnais tout de suite. »</p>
</blockquote>
<p>Ce témoignage est une visite guidée du New York d’avant le 11 septembre, arrogante et inhumaine, droguée et sans enfants. L’ouvrage n’est pas tendre. Il est cynique, sans vraiment proposer d’alternative.</p>
<p>Par exemple.</p>
<blockquote><p>Les artistes et les très riches s’adorent, ils s’apportent ce qu’ils désespèrent de ne jamais posséder : l’argent pour les uns, la lumière pour les autres. Ils se séduisent, font miroiter des possibilités, investissent, couchent ensemble. Puis ils trouvent mieux : plus fou, plus différent. C’est une question de peaux ou d’idées, tant qu’elles sont fraîches ».</p>
</blockquote>
<p>A la réflexion, ce livre est plutôt amusant pour les saillies comme celle-là, mais il est un peu décousu et mal fini. Il y a quelques solides fautes, d’anglais comme de français.</p>
<p>Une petite originalité, tout de même, Flore Vasseur a laissé dans la marge quelques définitions, rédigées avec la même plume fielleuse. Comme ceci :</p>
<blockquote><p>Entreprise 12 sur 20 : un patron, c’est un homme qui rêve et a peur. Il dort mal, se réveille souvent avec l’actionnaire qui hurle au téléphone. Alors, il s’entoure d’un management 12 sur 20. Des bons petits, juste un peu moins moyens que les autres, pas les plus intelligents, les plus dociles, installés au premier rang. Tellement honorés d’avoir été choisis, ils acceptent : sautes d’humeur, incohérences, dossiers refilés le vendredi soir. Surtout ne pas se laisser impressionner par leurs airs pressés et leurs tons suffisants. Ce sont des copies conformes, des copies qu’on forme et que, donc, on déformera. »</p>
</blockquote>
<p>Voilà, vite écrit, en fait. Un peu négatif. Pas inoubliable.</p>
<p><img src="https://www.leblogdeslivres.com/dotclear/images/couvertures/Fille.jpg" alt="Une fille dans la ville" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />
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<br /> <em>Une fille dans la ville, Flore Vasseur, littérature française, Les Equateurs, 270 pages, 18 euros. Notre note : 1/5.</em>
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</p>https://www.leblogdeslivres.com/post/2007/01/14/22-une-fille-dans-la-ville-flore-vasseur#comment-formhttps://www.leblogdeslivres.com/feed/atom/comments/18