L’histoire m’avait alléché. Un garçon de 13 ans, vêtu, donc, de culottes courtes, part en séjour linguistique. Il y rencontre Barbara, une créature britannique venue de Trinidad, d’une beauté qui donne de l’appétit. Ce qui devait arriver arriva : il en tombe amoureux. Là où cela se corse un peu, c’est qu’elle le lui rend bien. Commence donc une idylle en règle entre gamin et sa belle.

J’étais attiré par ce qui peut se passer dans la tête d’un petit homme en proie à un sentiment aussi fort que désarmant.

Première déception : l’ouvrage commence comme un manuel universitaire par une définition de la culotte courte. Cela pourrait être créatif s’il n’était assorti de propos un peu sentencieux sur le fait que, voyez vous mesdames et messieurs, les jeunes d’aujourd’hui ne portent plus de culottes courtes. Dans le texte, ça donne :

Les parents d’aujourd’hui, dans leur impatience de voir pointer le petit mâle dominant dans leur rejeton, l’affublent dès le plus jeune âge de ces tenues de petits mecs, - des beaufs enfants… - que notre société, aveuglée de vulgarité, se plaît à produire en modèle. »

Refermer le livre ? Mais j’ai quand même envie de savoir comment il s’y est pris, le garnement. La patience vaut le coup. L’épisode de leur rencontre, de leur approche et d'un tout petit premier contact vaut la lecture. Un aperçu, en deux extraits.

La première fois qu’il la voit, d’abord.

Barbara était l’exemple d’une de ces beautés rares de type eurasien – corps et traits à la fois fins et sensuels, peu cuivre cheveux noirs et raides – que produisent les croisements, lorsqu’un supplément de réussite et de grâce s’ajoute à leur intérêt esthétique habituel. Les gestes, les attitudes, les expressions, les regards, les inflexions de la voix, les sourires, communs à toutes les jeunes filles de son âge, devenaient chez Barbara les promesses d’une volupté et d’un bonheur luxurieux ».

Et puis la fois où il lui effleure la main (ben quoi ? je suis romantique) :

Je gardais conscience de m’être montré meilleur musicien que Barbara – malgré mon abandon du piano depuis presque trois ans- et de pouvoir ainsi prendre les devants, lui ouvrir le chemin : quand je voyais arriver un passage un peu difficile pour sa partie de clavier, je m’amusais à la soulager de trois ou quatre notes, les jouant pour elles, prélevées à sa ligne dans la partition. Ce n’étaient que prétextes et occasions pour que nos mains se touchent, pour que nos doigts se frôlent et, pour finir, je plaquai un accord par dessus sa main, l’emprisonnant sous la mienne – provoquant un gros pâté sonore- et refusant de la lâcher jusqu’à ce que nous eussions fini de rire de notre numéo burlesque ».

Et après ? Adieu la petit poussée de romantisme. Sur 500 pages, Fleisscher nous détaille comment il a pris sa bele dans toutes les positions. Point final. Cette seule phrase résume, à mon avis l’interminable suite du roman.

Vous étonnerais-je en vous disant que je suis déçu ? Ce récit du tout jeune mâle triomphant ayant séduit la naïve femelle me paraît presque vulgaire. Pas tant par le sujet, qui se veut érotique, que par cette manière hautaine et presque réactionnaire de le traiter.

L'amant en culottes courtes



L'amant en culottes courtes, Alain Fleischer, littérature française, Seuil, 660 pages, 22 euros. Notre note : 1/5.